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C-33 : Projet de loi No. 2 d'éxécution du budget de 2004

Honorables sénateurs, je participe assidûment à toutes les séances du Comité des finances nationales, dont je suis membre. Tous les dossiers et les projets de loi que nous y étudions m'intéressent. Je partage les opinions des sénateurs Massicotte et Murray et je comprends aussi les commentaires du sénateur Austin. Toutefois, je dois vous faire part de certaines informations.

J'ai assisté à toutes les sessions de breffage organisées par les fonctionnaires du ministère. Pourtant, en aucun moment n'a-t-on souligné l'aspect de rétroactivité ou de clarification. En aucun moment n'a-t-on discuté du dossier des organisations caritatives à but non lucratif ou du fait que 81 000 organisations de ces dernières allaient être affectées.

On a souligné tous les éléments positifs du projet de loi, et il y en a plusieurs, mais j'ai des réticences quant au fait qu'après avoir pris des mesures aussi positives pour l'ensemble de nos concitoyens, nos militaires et les personnes handicapées, on y ait inséré — et je ne peux pas dire que cela a été fait délibérément — un projet de loi concernant les multinationales.

Rassurez-vous, je ne suis pas touchée par les multinationales. Non pas que je n'en connaisse pas non plus. Je suis ce qu'on appelle une « citoyenne moyenne ». Par contre, le citoyen canadien moyen a certainement intérêt à ce que des règles de droit et d'équité soient en place, peu importe ses revenus.

Mes collègues ont tous commenté cette question de rétroactivité. Je n'ai pas de formation légale, mais je puis vous assurer d'une chose : une logique très simple sous-tend cette question. En effet, selon les témoignages que nous avons reçus des représentants officiels du ministère, le projet de loi de 1988 serait très clair. S'il est clair, pourquoi avons-nous besoin de le clarifier? Et s'il a été rendu très clair en 1995 par les jugements de la cour, pourquoi avons-nous besoin de ces deux éléments de rétroactivité? S'il n'avait pas été clair, pourquoi ne pas avoir inclus ces deux éléments dans les budgets de 1996-1997? Quelque chose m'échappe et j'ai de la difficulté à l'accepter.

L'autre point que j'aimerais porter à votre attention concerne l'article 35, qui touche les organisations à but non lucratif de notre pays. J'ai reçu par télécopieur, cet après-midi à mon bureau, une lettre qu'il me fait plaisir de vous lire :

Madame le sénateur,

Objet : Projet de loi C-33, modification des dispositions de la Loi de l'impôt relatives au contingent des versements.

Lors de notre comparution, le 2 mai, nous avons trouvé encourageant l'intérêt porté par le Comité sénatorial permanent des finances aux répercussions du projet de loi C- 33 sur les organismes de bienfaisance.

Cela m'amène à aborder un autre point. Le Comité sénatorial permanent des finances est le seul comité parlementaire à avoir démontré son respect pour les organisations à but lucratif en prenant le temps de les écouter, cette semaine.

Les observations que vous avez faites pendant l'audience et au cours des délibérations ultérieures du comité, le 3 mai, ont prouvé que vous avez une compréhension profonde des difficultés que le projet de loi crée pour les organismes de bienfaisance. Vous prévoyez faire des observations à l'étape de la troisième lecture.

C'est ce que je fais, honorables sénateurs. L'auteur de la lettre ajoute :

Le projet de loi C-33 propose les modifications les plus importantes, en 20 ans, à la réglementation fédérale touchant les organismes de bienfaisance enregistrés. Ce projet de loi modifie en profondeur les exigences relatives au contingent des versements. Obligation est faite à ces organismes d'affecter, de trois façons, un certain pourcentage des dons ou des biens qu'ils reçoivent à des activités de bienfaisance :

a) à compter de 2005, les organismes de bienfaisance enregistrés après le 23 mars 2004, soit la date de présentation du budget, doivent consacrer chaque année 3,5 p. 100 de leurs immobilisations à des activités de bienfaisance, et la même exigence s'appliquera aux organismes de bienfaisance enregistrés actuels.

b) les deux parties à des transferts entre organismes de bienfaisance devront se conformer à l'exigence relative au contingent des versements alors que, précédemment, seul l'organisme de bienfaisance assurant le financement devait inclure le montant transféré dans son contingent des versements.

c) le contingent des versements d'immobilisations annuels est réduit de 4,5 p. 100 à 3,5 p. 100 dans le cas des fondations.

Je fais une brève pause. Les fonctionnaires ont déclaré devant le comité que l'article 35 vise à normaliser les fondations et les organismes de bienfaisance. Dans la région du monde d'où je viens, il n'y a pas de fondations. Nous sommes relativement pauvres. Cependant, avec l'article 35, les organismes voient leurs versements obligatoires passer de 4,5 p. 100 à 3,5 p. 100 tandis que les organismes qui ne sont pas de bienfaisance, soit les organisations communautaires sans but lucratif, qui n'avaient aucun versement obligatoire à faire auparavant, sont tenus de verser 3,5 p. 100.

En plus de ce changement de fond, le projet de loi introduit de nouveaux concepts comme celui des biens durables et celui du compte de gains en capital, ce qui complique encore davantage le respect de la Loi de l'impôt sur le revenu par les organismes de bienfaisance enregistrés. Les exigences rattachées au contingent des versements sont maintenant beaucoup trop complexes pour l'organisme de bienfaisance type qui a moins d'un million de dollars en revenus annuels et qui compte exclusivement sur des bénévoles pour tenir ses livres. Même l'organisme de bienfaisance qui a un ou deux employés rémunérés ne possédera pas l'expertise voulue pour se conformer à ce genre d'exigence réglementaire complexe. En fait, les avocats et les comptables ne s'entendent pas sur les effets de ces changements sur les organismes de bienfaisance et surtout sur les bénévoles.

Outre le fardeau réglementaire excessif que cela impose aux groupes sectoriels, il y aura des conséquences négatives importantes pour certains organismes de bienfaisance. Plus précisément, les fonds dont disposent beaucoup de groupes pour assumer les coûts de base seront réduits, ce qui fait que les organismes de bienfaisance qui ont peu d'argent liquide risquent de voir l'érosion de leurs immobilisations.

Dans la question que vous avez posée le 2 mai, vous avez parlé d'un organisme de bienfaisance qui fournit des logements abordables. Comme nous vous l'avons dit, nous ne savons pas si cet organisme devra se préoccuper de ses réserves pour réparations et remplacements ou même de la valeur de ses logements au moment de déterminer s'il a respecté son contingent des versements. Les musées, les fiducies foncières et les organismes de bienfaisance qui ont des centres sportifs ou autres pourraient se retrouver dans une position impossible.

Les objectifs de la politique gouvernementale derrière le contingent des versements, qui visaient principalement à contrôler les coûts de collecte de fonds et à empêcher l'accumulation illimitée de capital par les fondations, ont été annulés par des décisions de tribunaux et d'autres mesures. On peut soutenir que les dispositions actuelles ne peuvent plus permettre d'atteindre ces objectifs.

À ce moment-ci, devant la possibilité que ce projet de loi devienne loi, nous examinons les moyens à notre disposition et gardons la liberté de communiquer avec vous.

Cette lettre est signée par les trois témoins que nous avons entendus et qui représentaient Imagine Canada, Fondations philanthropiques Canada et la Muttart Foundation.

Honorables sénateurs, les problèmes signalés dans la lettre sont préoccupants.

Il y a, dans ma collectivité, des gens qui travaillent pour des organismes de jeunes. Chaque année, ils vendent, dans notre petite localité de gens à faible revenu, des billets pour le tirage d'une motocyclette afin de pouvoir aider au financement de la patinoire locale où les jeunes jouent au hockey. Ils recueillent peut-être 25 000 $ ou 30 000 $ par année, argent dont ils ont besoin.

Je connais aussi des organismes sans but lucratif qui ont construit des logements abordables pour nos personnes âgées. Chaque année, ils mettent de côté une réserve. Une réserve est une immobilisation et cette disposition s'applique donc. Notre pays compte 81 000 organismes sans but lucratif et plus de 2 millions de bénévoles. L'autre endroit n'a même pas pris le temps de les rencontrer à leur demande. Nous l'avons fait. Je crois que nous devons aussi examiner ce projet de loi plus attentivement à l'étape de la troisième lecture pour voir comment nous pouvons répondre aux préoccupations des différents sénateurs.