Honorables sénateurs, vous comprendrez qu'étant donné le processus utilisé pour étudier ce projet de loi, je n'ai pas préparé de discours. Je vais tout de même essayer de brosser un tableau de la situation.
Je dois d'abord dire que je ne suis pas impressionnée par nos collègues de l'autre endroit. Ce commentaire n'est pas partisan du tout. En seulement 15 minutes, on a présenté ce projet de loi de un milliard de dollars en première lecture, on a procédé à la deuxième lecture, on l'a renvoyé au comité plénier pour finalement l'adopter en troisième lecture. Je ne suis impressionnée par aucun parti, et encore moins par le gouvernement.
Vous vous rappellerez que, à la fin de 2005, le gouvernement minoritaire libéral avait présenté un programme d'aide au développement économique des communautés de 1,5 milliard de dollars. Ce programme a été aboli en 2006 avec l'arrivée du gouvernement minoritaire conservateur. Dès lors, les collectivités éprouvant des difficultés économiques ont cessé de recevoir une aide du gouvernement fédéral.
Vous vous rappellerez également que le Sénat vivement critiqué l'entente relative au bois d'œuvre que le premier ministre a signée en avril 2006 avec les Américains, ce qui laissait à l'industrie forestière américaine une somme de un milliard de dollars. En avril 2006!
Des compressions ont été effectuées au programme de 1,5 milliard de dollars de février 2006 lorsque, deux mois plus tard, en avril 2006, un autre milliard de dollars a été enlevé au secteur forestier canadien et laissé à l'industrie compétitive américaine. Notre industrie forestière, à elle seule, se retrouvait avec 2,5 milliards de dollars pour assurer son développement.
Nous sommes en février 2008, presque deux ans plus tard, et le gouvernement actuel dit qu'il va aider l'industrie forestière en donnant un milliard de dollars! Où veut-il en venir? Quelle est la logique? Ce milliard de dollars arrive vraiment trop tard et c'est trop peu puisque des dommages ont déjà été causés à nos petites communautés et à notre industrie forestière. Plus de 135 000 emplois ont été perdus dans nos communautés rurales, particulièrement dans le Nord du Québec, le Nord de l'Ontario et tout le Nord et une partie du Sud du Nouveau-Brunswick.
Lorsque des rumeurs ont commencé à circuler qu'il y avait « peut- être » de petits problèmes dans l'industrie de l'automobile, il n'a pas fallu deux ans au gouvernement pour réagir. Ce n'étaient que des rumeurs, et une somme de 765 millions de dollars a été accordée à ce secteur. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'une industrie de base, dans ma province en tout cas, il faut attendre deux ans. Les Américains viendront avant les Canadiens dans ce dossier. Nous en avons eu la preuve en avril 2006.
Lorsque l'Ouest canadien a été aux prises avec des problèmes d'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), personne au Sénat ne s'est opposé à offrir de l'aide à cette industrie particulière. C'est drôle, mais lorsqu'on parle d'un problème qui se situe particulièrement au Nouveau-Brunswick, dans le Nord du Québec ou dans le Nord de l'Ontario, il faut attendre deux ans, et lorsqu'on veut instaurer un programme, on dit que cela ne se fera pas sur la base des emplois perdus dans ces communautés, mais sur une base per capita.
Donc, même si l'Alberta et la Colombie-Britannique crient sur tous les toits au Canada et sur l'arène mondiale qu'elles sont à la recherche d'employés, elles se qualifient encore plus que les provinces qui ont besoin d'aide avec le programme qu'on nous propose.
Justement, honorables sénateurs, c'est absurde! Quand on parle de problèmes dans l'Ouest, on identifie directement un programme d'aide, mais lorsqu'on parle d'un problème dans le Nord de l'Ontario, dans le Nord du Québec ou au Nouveau-Brunswick, cela doit être réglé au prorata per capita. C'est inacceptable! Et en plus, deux ans plus tard!
À première vue, il est inacceptable que toutes les provinces puissent bénéficier de subventions sur la même base étant donné qu'elles n'éprouvent pas les mêmes problèmes. Il est inacceptable que les premiers ministres ne voient pas les effets de ce programme. Oui, je suis un sénateur libéral, mais si mon premier ministre libéral provincial accepte dix millions de dollars par année pour trois ans et que l'Alberta reçoit 150 millions de dollars, je vais crier sur tous les toits. Je ne serai certainement pas d'accord avec lui. Cela n'a rien à voir avec la politique, mais avec la justice sociale. En réalité, ce gouvernement conservateur fédéral n'a pas vu et n'a pas pu voir les répercussions à court, moyen et long termes sur nos travailleurs de l'industrie forestière lorsqu'il a signé l'Accord de libre-échange avec les Américains.
C'est trop peu, trop tard!
Ce qui me désole encore plus, c'est de voir les députés de l'autre endroit, qui passent leur temps à critiquer le Sénat et les sénateurs, adopter en 15 minutes un tel projet de loi, appuyant ainsi les écarts entre ceux qui ont et ceux qui n'ont pas.
Vous me direz qu'un milliard de dollars, c'est mieux que rien, mais un milliard de dollars bien distribué serait mieux encore. J'espère que, lorsque le Comité sénatorial permanent des finances nationales aura étudié ce projet de loi, il en fera rapport avec des commentaires, sinon des amendements ou des spécifications, de sorte que nous, les sénateurs, aurons rempli notre devoir envers la population.